jeudi 27 octobre 2011

Note quelconque

Ce soir j'ai relu un tout petit peu mon ancien blog.
C'est marrant parce que, des fois, je tombe sur de vieilles notes où je me sens tout à fait en désaccord avec ce que j'avais écrit. C'est plutôt une bonne nouvelle, car il paraît qu'il n'y a que les cons qui ne changent pas d'avis.
Non mais, sérieusement, c'est plutôt bien de se rendre compte que nos pensées évoluent, qu'en fait on ne pense déjà plus de la même manière qu'il y a un an ou deux. C'est rassurant quelque-part.
Par exemple, j'exprimais parfois mon désir d'avoir une vie qui ne soit pas gratuite, (une vie qui ne serait pas absurde, "dépensée en l'air", inutile) mais au fond, la vie de la Terre elle-même est gratuite, face à l'immensité de l'univers et face à sa finitude. A partir de là, même Barack Obama et J.K Rowling mènent une vie gratuite, à un certain degré.
Et à propos de vie gratuite, j'aime énormément quand mon père m'écrit que je devrais essayer d'envisager la vie des humains comme celle des champignons : c'est bête, mais cette image me parle beaucoup.

Evidemment, on a tous envie de trouver un sens à sa vie, mais prendre du plaisir à vivre, c'est déjà ça, et ça peut être parfaitement gratuit. A titre "gratuit", je pourrais ainsi voyager, découvrir un minimum le monde, rencontrer des gens super, découvrir plein de trucs et produire un travail dont je serai fier. Quelque-part, tout ça serait assez gratuit, mais ce serait très satisfaisant, et je serai peut-être un petit peu moins scandalisé face à la mort en ayant préalablement rempli un minimum ma vie.

En attendant, je lis "Dans les forêts de Sibérie" de Sylvain Tesson, j'y découvre des expériences que je ne serai jamais capable d'affronter, mais qui me paraissent admirables et qui, quelque-part, me manquent.

Extraits choisis :

"La vie dans les bois permet de régler sa dette. Nous respirons, mangeons des fruits, cueillons des fleurs, nous baignons dans l'eau de la rivière et puis un jour, nous mourons sans payer l'addition à la planète. L'existence est une grivèlerie. L'idéal serait de traverser la vie tel le troll scandinave qui court la lande sans laisser de traces sur les bruyères. Il faudrait ériger le conseil de Baden-Powell en principe : "Lorsqu'on quitte un lieu de bivouac, prendre soin de laisser deux choses. Premièrement : rien. Deuxièmement : ses remerciements." L'essentiel ? Ne pas peser trop à la surface du globe. Enfermé dans son cube de rondins, l'ermite ne souille pas la Terre."

"La cabane, royaume de simplification. Sous le couvert des pins, la vie se déduit à des gestes vitaux. Le temps arraché aux corvées quotidiennes est occupé au repos, à la contemplation et aux menues jouissances. L'éventail de choses à accomplir est réduit. Lire, tirer de l'eau, couper le bois, écrire et verser le thé deviennent des liturgies. En ville, chaque acte se déroule au détriment de mille autres. La forêt resserre ce que la ville disperse."

"19 Février
C'est le soir, il est 9 heures, je suis devant la fenêtre. Une lune timide cherche une âme soeur mais le ciel est vide. Moi qui sautais au cou de chaque seconde pour faire rendre gorge et en extraire le suc, j'apprends la contemplation. Le meilleur moyen pour se convertir au calme monastique est de s'y trouver contraint. S'asseoir devant la fenêtre le thé à la main, laisser infuser les heures, offrir au paysage de décliner ses nuances, ne plus penser à rien et soudain saisir l'idée qui passe, la jeter sur le carnet de notes. Usage de la fenêtre : inviter la beauté à entrer et laisser l'inspiration sortir."


"La mésange revient. Dans mon guide ornithologique je cherche sa fiche technique. (…) La visite du petit animal m'enchante. Elle illumine l'après-midi. En quelques jours, j'ai réussi à me contenter d'un spectacle pareil. Prodigieux comme on se déshabitue vite du barnum de la vie urbaine. Quand je pense à ce qu'il me fallait déployer d'activité, de rencontres, de lectures et de visites pour venir à bout d'une journée parisienne. Et voilà que je reste gâteux devant l'oiseau. La vie de cabane est peut-être une régression. Mais s'il y avait progrès dans cette régression ?"

Et, tandis que l'écrivain sort en expédition pour visiter un lointain voisin :

"A la troisième heure, je risque un coup d'oeil face au vent, vers les montagnes de l'ouest. Les arbres montent la garde jusqu'à ce que la montagne ne veuille plus d'eux à l'altitude de 900 mètres. Dans les draperies de versants sinuent des canyons. Dans quatre mois, ils recevront l'eau de la fonte, la déverseront dans la vasque. Dès que j'arrive à leur hauteur, le vent redouble, par effet d'entonnoir. Dire que des écrivains essaient de brosser la beauté de lieux pareils.
J'ai avalé presque tout Jack London, Grey Owl, Aldo Leopold, Fenimore Cooper et une quantité de récits de l'école du Nature Writing américain. Je n'ai jamais ressenti à la lecture d'une seule de ces pages le dixième de l'émotion que j'éprouve devant ces rivages. Je continuerai pourtant à lire, à écrire."

Sympathique manière de créer la frustration chez le lecteur !…

J'ai beau, dans les faits, être casanier, j'ai soif d'expériences.


A part ça, j'ai trois dessins aux crayons de couleurs à vous montrer, mais ça attendra un peu car il faut d'abord que je les scanne.

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